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Kreyenriedt

Voici une très ancienne famille du Florival dont le nom a presque disparu aujourd'hui.

Ce nom est composé de deux partie: le suffixe RIETH, qui indique un endroit marécageux (le Ried), et le préfixe KREY.

Les armoiries des Kreyenrieth  

Ce dernier est très courant comme nom de lieu en Alsace, tel le Kreyenacker à Appenwihr, les Kreyenmatten à Oderen et le Kreyeneck à Orschwihr.

Il provient de l'ancien mot dialectal Krähe représentant le cri du corbeau freux, cri qui lui a donné son nom.

Ces deux parties sont par ailleurs courantes dans la formation des noms de lieux et donc dans celle des noms de famille.

Citons les RIETHMULLER, les BOBENRIETH, les KREYENBUHL etc..

Une des plus anciennes familles de Guebwiller

La chronique de Guebwiller rédigée par le greffier Hans STOLZ au début du XVIè siècle, donne une légende quant à la création de Guebwiller.

Cette légende précise que vers 1162 des familles qui vivaient dans les vallons latéraux de la Lauch vinrent s'établir à l'abri des nouveaux murs d'enceinte.

Certaines virent du vallon du Kreyental où coule le Kreyenbach.

Dès 1286 est cité dans le cartulaire de Murbach un Burcard VON KREYENBACH.

Nous retrouvons les KREYENRIETH dès le tout début du XVIè siècle, avec plusieurs représentants.

L'un était forgeron: c'est maître Léonard KRÄENRIET qui possédait deux maisons dans la ville basse.

Un autre, Jean, avait des terres à Issenheim.

Un troisième, Martin, était propriétaire de vignes.

Tous trois devaient verser pour leurs biens une redevance annuelle au couvent des Dominicains, payable le jour de la Saint Martin.

En 1537 Jean fut accusé par un thannois d'avoir coupé un sac.

En 1540 Martin versait six livres comme "Allmendzinsen" (cens sur les communaux).

De nombreuses mentions de cette famille figurent dans les anciens registres et parchemins conservés aux Archives Municipales de Guebwiller, dont l'inventaire dressé par l'archiviste GINSBURGER fut publié en 1928.

Des familles nombreuses

Les registres des baptêmes de Guebwiller étant fort ancien, ils nous permettent d'établir une généalogie sur plusieurs générations.

Au tout début de ces registres nous trouvons les baptêmes du couple Thiébaut KREYENRIEDT et Appolinie FRIDMANN.

Les enfants, nés de 1583 à 1600, se prénommaient Agnès, Frédéric, Valentin, Jean, Marguerite et Ursule.

A la même époque vivaient les conjoints Nicolas KREYENRIEDT et Marguerite WEINBRENNER. Nicolas était le secrétaire de la chancellerie de Murbach. Il obtint de l'abbaye en prêt un capital de cinquante florins, capital que remboursa par la suite la ville de Guebwiller.

Preuve de sa position sociale élevée, la marraine de son fils Jean Ulrich né en novembre 1585 fut la noble Appolinie D'OSTEIN née DE HALLWIL, alors que le parrain n'était autre que le coadjuteur de la principauté de Murbach.

Six ans plus tard, ce fut la noble dame Marguerite STOER née DE REITENAU qui tint sur les fonds baptismaux le petit Nicolas, fils du secrétaire Nicolas KREYENRIEDT.

Sans doute identique au Nicolas fils cité ci-dessus, un Nicolas KREYENRIETH sera l'époux de Barbe RENCKLER.

Leurs enfants naquirent à Guebwiller entre 1615 et le début des troubles de la guerre de Trente Ans.

Parmi eux les fils Jean, né en 1616, et Pierre, né en 1626.

Le premier fut boulanger, le second orfèvre.

Jean épousa Catherine HERTZOG dont il eut six enfants. Sa femme décéda en décembre 1668 et fut enterrée dans le cimetière de l'église Saint Léger, dans l'angle de la sacristie et de l'ossuaire. Le veuf se remaria alors en 1670 à Marguerite SCHLOSSER dont il eut quatre enfants.

En 1670 il acquit du potier d'étain Jean STRUB des terres au ban de Buhl. Décédé en décembre 1700 il fut inhumé dans l'église des Dominicains de Guebwiller.

De ses quatre enfants du second lit l'un décéda en bas-âge, un autre, Catherine, épousa Jean CADEL.

Le troisième, un fils prénommé Marc, fut procureur et épousa une FRANCK dont il eut six enfants.

Le quatrième enfin, un fils nommé Jacques Thiébaut, épousa en 1695 Anne RUCH qui lui donna douze enfants.

Pierre et ses quatorze enfants

Fils de Nicolas et de Barbe RENCKLER Pierre KREYENRIEDT vit le jour à Guebwiller en 1626.

Il épousa en premières noces Ursule SCHINBEIN, la soeur du greffier de Saint Amarin. Orfèvre de profession il appartenait à la corporation des forgerons dont il fut le chef durant vingt neuf années.

Après le décès de sa femme, il se remaria en 1664 à Marie Marguerite LANGHANS issue d'une ancienne famille guebwilleroise.

Onze enfants firent la joie du couple, enfants qui s'allièrent aux familles HAAS, PFAFFENZELLER, BANMEYER, JENNY, WILHELM.

Un fils, Nicolas, né en 1671 fut chirurgien. Ce Nicolas tenant aussi la trésorerie de l'église eut treize enfants de ses deux femmes, Anne Marie SITTER et Anne Barbe WECKERLIN.

Les armoiries des Kreyenriedt

L'armorial de Louis XIV mentionne parmi les bourgeois blasonnés de Guebwiller deux KREYENRIEDT: Pierre et Nicolas.

Tous deux portaient "d'or à un corbeau de sable, senestré d'une étoile à six raies de gueules".

On retrouve comme meuble héraldique dans ce blason le corbeau, "Kraye", composant la moitié du patronyme.

Faits divers

La chronique du dominicain Séraphin DIETLER nous apprend que le douze janvier 1719 on mit en place dans le clocher de l'église Saint léger les quatre cloches neuves qui avaient été fondues à Guebwiller, dans la propriété de Jean KREYENRIEDT sise ville haute.

Cette même chronique raconte que le vingt cinq mai de l'année 1722, alors que Jacques Thiébaut KREYENRIEDT se rendait à Colmar, un drame se joua dans sa maison à Guebwiller.

Il avait laissé ses pistolets sur la table, et ses deux plus jeunes garçons les virent. L'un d'eux en prit un, pensant qu'il n'était pas chargé, et mit son frère en joue. Il tira et le coup passa près de la tête de son jeune frère. De la poudre et des plombs virent frapper la moitié du visage de l'enfant et il fallut par la suite les extraire.

Y a-t-il un rapport avec la fin heureuse de ce drame et le don de la grande croix fait en 1737 ?

Cette croix avec la statue polychrome du Christ se trouve dans le bas-côté Sud de l'église Saint Léger et porte une inscription rappelant la famille donatrice (Inventaire Général des Monuments et des Richesses Artistiques de la France).

Kreyenrieth le philosophe

Le Nouveau Dictionnaire de Biographie Alsacienne, dans sa livraison numéro 22, consacre une courte notice à Jacques Thiébaut KREYENRIETH.

Un auteur de ce nom est connu et publia à Strasbourg "Philosophia thomistica" en 1727 et "Zodiacum mellifluum" en 1742.

WETTERWALD l'identifia avec Jacques Thiébaut, né en 1687 au sein de la famille de Marc KREYENRIETH et Cunégonde FRANCK.

On peut toutefois douter de cette identification car d'une part le prénom Jacques Thiébaut était très en vogue chez les KREYENRIETH, et d'autre part le fils de Marc portant ce prénom, boucher de profession, décéda en 1733 après avoir eut treize enfants de ses épouses Marguerite BIEHLER et Catherine WEILER.

Les KREYENRIETH ont donné plusieurs bourgmestres à Guebwiller, de très nombreux conseillers, un curé et un franciscain.

Ils figurent dans la plupart des ascendances guebwilleroises et ont essaimé avant la Révolution à Cernay et Thann.

Ils méritaient bien ce bref rappel de leur histoire.

André GANTER