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Birghan - Birkan

Un nom d'oiseau pour nom de famille

Plus d'un lecteur sera surpris d'apprendre que le patronyme Birghan, qui était jadis très bien représenté à Gueberschwihr, puis à Husseren-les-Châteaux et enfin Pfaffenheim, s'explique très simplement : le mot allemand « Birkhahn » désigne tout simplement le coq de Bruyère. On peut dès lors se demander pourquoi un tel « nom d'oiseau » a pu devenir un patronyme dont les premières traces remontent, en Allemagne, au XIIIe siècle. Nous verrons que ce type de noms est bien plus fréquent qu'il n'y paraît.

René Birghan fils et son épouse Lucie, née Hanauer, devant leur propriété de Pfaffenheim.  

Les premières mentions de ce nom de famille peuvent être trouvées à Hambourg où est cité en 1296 déjà un certain Johannes dictus Berchane : Jean dit le coq de bruyère, transition entre « surnom » et patronyme. En 1488, c'est à Barth, en Poméranie, qu'il est possible de relever le nom d'un autre homme appelé « der Berkhane ». Pour l'étymologiste Brechenmacher, il ne fait pas de doute qu'il s'agit là du surnom d'un chasseur de coqs de bruyère devenu, par métonymie, patronyme ! Ajoutons une seconde possibilité d'explication : celle du « Häusername » (nom de maison). En Allemagne, où le nom est fréquent à Hanovre, il se rencontre aussi sous les graphies Berkan, Berkhan ou Berkhahn, dans sa forme nordique. Chez nous, une autre souche du nom, à Colmar et sur les bords du Rhin, s'écrit Birgkan.

À Gueberschwihr

Évoquer ainsi l'Allemagne n'est pas un hasard : il se peut, en effet, que les premiers Birghan alsaciens soient venus de ce pays voisin du nôtre, peu de temps après la guerre de Trente Ans (1618-1648). Si les registres paroissiaux de Gueberschwihr commençant en 1658 ne révèlent rien de l'origine de la famille, André Ganter a en revanche trouvé dans le notariat ancien un contrat de mariage précisant que le futur époux, Michael Bürghann, venait « von Friessenheim ». Reste que l'Allemagne compte quatre Friesenheim et qu'un cinquième se situe près de la frontière, côté alsacien, à hauteur d'Ebersmunster et à une quinzaine de kilomètres de Sélestat ! Le Friesenheim allemand le plus proche de nous se situe à une vingtaine de kilomètres de l'alsacien, non loin de Lahr.

Marié à Dorothea Schedlerin (Schedele, Schedelin), qui lui donna un fils prénommé également Michael, Michael se remaria dès 1661 à Rouffach avec Othilia Bass. Michael senior eut un autre fils, Jacobus, qui convola en 1664 avec Maria Bierenbach, tandis que sa fille Catharina Bürckhan épousa en 1686 Albinus Kober. Le manque de précision des registres paroissiaux de Gueberschwihr, à l'époque, rend difficile à identifier certains membres de la famille, tels que le veuf Laurentius Birkhan qui s'unit en 1690 à Catherine Kastner, la fille de l'instituteur de Walbach, ou encore Melchior Birckhan, cité comme témoin (donc adulte) dès 1663. D'autres mariages lièrent les Birghan aux familles Munsch (jadis Mongé), Ramser (de Wihr-au-Val), Kayser (de Colmar), Bisantz, Lichtlé, etc.

L'ancêtre dont descendent avec certitude tous les Birghan est André, qui s'unit en 1698 à Catherine Welcker : avant lui, les choses sont peu précises, les inscriptions parfois rapides dans les registres rendant, à Gueberschwihr comme ailleurs, l'établissement de filiations hasardeuses : nous ignorons par exemple qui est Elisabeth Birghan qui épousa, en 1731 à Raedersheim, David Krafft.

Dès les premières générations alsaciennes, les Birghan étaient essentiellement des vignerons : Michel offrit des vignes à sa promise Dorothea dès le milieu du XVIIe siècle, Jacob Byrkhan en acheta en 1664 trois Schatz à Hanns Götz, de Gueberschwihr, pour une somme de 70 livres. Mais la famille donna également deux prévôts au village, aux XVIIe et XVIIIe siècles, ainsi qu'un « chyrurgus », donc médecin, en la personne de Jacob Birghan. Sans compter qu'un autre Jacob sonnait en 1772 la trompette en Hongrie dans un régiment français avant d'en assurer en 1779 la direction musicale. Au XIXe siècle, Pantaléon était meunier et demanda en 1817 un passeport pour émigrer aux États-Unis où débarqua également, en 1923, un Joseph Birghan.

Né à Gueberschwihr en 1837, Georges se maria à Husseren, initiant là une nouvelle branche qui aura de l'avenir. Ce n'est que plus tard que les Birghan gagnèrent Pfaffenheim, avec René (*1902-+1950), le père de René fils (notre photo). Le plus jeune Birghan, Lucas, originaire de Husseren, est né en 2002 et vit à Colmar. Il descend du frère de René père, Georges Birghan (*1905-+1984), de Husseren-les-Châteaux.

Finissons sur ce Birkan de Jouy-en-Josas (Yvelines), auteur de plusieurs ouvrages consacrés à la chasse à la perdrix et à l'élevage : ce Marcel Birkan aurait-il l'intuition que son nom désignait probablement au Moyen Âge un chasseur ?

Denis Dubich