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Holder

C'est probablement au sureau, au «Holunderbaum» ou «Holderbaum» que la famille que nous proposons de présenter aujourd'hui doit son nom. Le premier Holder fut sans doute surnommé ainsi parce qu'il vivait près d'un tel arbre. Certaines souches peuvent cependant tirer leur nom du coteau sur lequel ils résidaient, die Halde, d'où les Halder, voire les Sommerhalter ou Winterhalter.

Les Holder sont établis dans plusieurs de nos villages dès le XVIe siècle : en 1536, on les trouve à Wuenheim, puis en 1571 à Wattwiller où ils tiennent des terres appartenant à l'Odre de Malte de Soultz auquel ils sont dès lors tenus de payer un cens ; au milieu du siècle, ils sont déjà installés à Ungersheim, ainsi qu'à Réguisheim en 1552 au plus tard, puis à Feldkirch et à Merxheim.

Fièrement, Reine Holder née Misslin présente l'arbre généalogique de la branche des Holder de Feldkirch : une douzaine de générations entre 1620 et 1934.  

Présents depuis le Moyen-Âge ?

Avant le début du XVIe siècle, l'origine de la famille demeure mystérieuse : le patronyme Holder est assez répandu dans l'ensemble du monde germanophone, mais il convient tout de même de signaler qu'un Houlderer possédait déjà une maison à Soultz en 1396. Nos Holder seraient-ils issus de cette très ancienne souche alsacienne, si l'on sait que ce patronyme ne sera connu à Soultz qu'à partir de 1674 ?

D'où que la famille soit venue - si elle n'est pas issue desdits Houlderer de Soultz -, elle devait être présente sur le sol alsacien dès le XVe siècle, à considérer le nombre relativement important de porteurs du nom dans les différents villages du secteur dès environ 1550. Plusieurs Holder tenaient des terres des Antonins d'Issenheim. Jacob Holder d'Ungersheim, par exemple, devint en 1605 un nouveau colonger, «ein neuer Huber», à la suite d'Apollinaire Holder, qui était probablement son père. Cela signifie qu'il se vit confier une ferme à exploiter par les Antonins. Conformément à la tradition, il promit d'offrir à l'occasion de cette nomination une tournée, le «Hubenbecher», aux autres colongers, dans une taverne d'Issenheim.

Restons un instant à Ungersheim où les registres paroissiaux débutent dès 1580, ce qui est très rare et nous permet de relever quelques ménages du nom. Dès 1585, nous relevons ainsi le baptême de Gaspard, né de l'union de Peter Holder et d'Appolonia Berger. En 1586 est baptisé Michael, fils de Michael Holder et d'Otilia Meyer qui était originaire de Guebwiller. À la même époque, en 1587 précisément, Peter Holder et son épouse Margaretha portent sur les fonts baptismaux de l'église saint-Michel leur fils Mathias, peu de temps d'ailleurs avant que Michael et Otilia ne fassent baptiser leur fils Heinrich qui aura une petite soeur, Marie, en 1588. En septembre 1591, c'est Steffan Holder qui a un enfant avec son épouse Catharina Holder, de même que Jacobus Holder et Elisabetha Meyer, au mois d'octobre. Les jeunes couples Holder sont donc déjà au nombre de cinq pour le seul village d'Ungersheim, à la fin du XVIe siècle. La souche de Feldkirch date également de cette époque-là et provient d'Ungersheim. Les premiers Holder merxheimois, apparus en 1587, semblent être venus de Réguisheim.

Le mythe des trois survivants

La guerre de Trente ans (1618-1648) et particulièrement le cruel épisode dit «des Suédois» (1632) laissèrent un souvenir ineffaçable dans l'esprit des Alsaciens. Peu de villages n'en conservent une anecdote, un lieu où fut torturé quelque paroissien, ou encore une légende dont on ne saura dans bien des cas jamais si elle correspond aux faits historiques ou si elle a été érigée au fil des générations au rang de parabole. À Merxheim, une tradition prétend ainsi que seuls trois hommes survécurent à la guerre : un Schmidt, un Kimpflin et un Holder. Certes, ces trois familles existaient avant et après la guerre, si bien que la tradition dit partiellement le vrai sur l'affaire, mais d'autres familles en réchappèrent heureusement et se retrouvent dans les registres de la paroisse en 1649 : les Grunenberger, les Lidolff ou encore les Gross se comptent parmi ces lignés merxheimoises survivantes.

Voilà qui met définitivement un coup d'arrêt à la croyance, paradoxale, de certains membres de la famille elle-même, que les Holder seraient venus de Suisse. Pas de fumée sans feu, néanmoins : quelques Holder ont trouvé refuge dans la Confédération pendant la guerre de Trente ans et sont ensuite revenus en Alsace. Johann Holder, qui rendit l'âme à Ungersheim en 1676, s'était marié à Alschwil, dans le canton de Bâle Campagne, avec Anna Maria Pfulb ; cette dernière était issue d'une famille connue dès le tout début du XVIe siècle à Feldkirch. De même, en 1641 déjà, donc en pleine guerre, le curé d'Ungersheim inscrivit dans son registre que la fille de Caspar Holder et de Maria Hurter fut baptisée à Bösingen, dans le canton de Fribourg.

Les premiers magistrats et des religieux

Partageant au XVIIe siècle le privilège des familles alsaciennes de souche, par rapport aux immigrés de l'après-guerre, les Holder faisaient partie à Merxheim, à Ungersheim comme à Feldkirch des lignées dominantes. Nous les trouvons dès lors convolant de préférence avec des membres d'autres familles anciennes de ces lieux, voire conservant presque jalousement les charges de prévôts ou de «Bürgermeister», donc de maires ou en tout cas de «jurés», c'est-à-dire de membres de ce que l'on appellera plus tard le conseil municipal.

Mais la famille donna aussi un grand nombre de prêtres et de religieuses à l'Alsace, et ce du début du XVIIIe siècle à nos jours.

Présents dans l'arrondissement de Guebwiller depuis cinq siècles, les Holder ont surmonté sans s'éteindre les accidents de l'histoire et continuent de fleurir comme le sureau dont ils tirent sans doute leur nom.

Denis Dubich