Notices de familles ( 1305 entrées )

Ehret

Le patronyme était particulièrement bien représenté dans la vallée de la Doller sous la forme ERHARD et EHRET. C'est cette dernière graphie qui a prévalu, et nombreuses sont encore à l'heure actuelle les familles EHRET demeurant dans la haute vallée de Masevaux.

La vallée de Masevaux est le berceau des Ehret  

Nous disposons, et le fait est assez rare pour le souligner, d'une liste d'habitants de la vallée de Masevaux datant de 1515 (archives de la ville de Masevaux).

Cette liste, qui a été publiée dans le bulletin Bergha, reprend, village par village, tous les chefs de famille de la seigneurie de Masevaux, de Guewenheim à Sewen.

Dans ce document, trois familles ERHARTT sont déjà citées, ce qui laisse à penser que leur présence est bien antérieure. La première famille habitait la ville de Masevaux (Hans ERHARTT), les deux autres demeuraient à Rimbach (celle de Nicolas ERHARTT et celle du fils de Vit ERHARTT).

De nombreux arbres généalogiques

Le curé François-Antoine BEHRA, enfant de la vallée de Masevaux où il repose au cimetère de Wegscheid, fut un généalogiste exceptionnel. Sa vie durant, il a compulsé les registres anciens pour reconstituer les familles des paroisses dont il a eu charge d'âmes.

Par amour pour sa vallée, il a aussi réalisé des listes et arbres généalogiques des familles de la haute vallée de la Doller. Ces travaux, déposés par l'abbé HAAN aux Archives Départementales à Colmar, constituent une mine irremplaçable pour le généalogiste.

Les listings concernant la famille EHRET comportent de nombreux feuillets reprenant près de deux cents couples avec leurs enfants, de la fin du XVIè siècle à la fin du XIXè. Ils sont complétés par une douzaine d'arbres généalogiques de différents formats.

Moulins et étangs

Le XVIIè siècle fut sans conteste une des périodes les plus sombres de notre histoire. La guerre de Trente ans, avec son cortège de calamités, était passée par là. En 1632, la ville de Masevaux fut mise en état de défense.

Quatre gardes se relayaient jour et nuit, touchant un salaire de quinze sols. Un maître de la garde, au salaire de deux livres (soit 40 sols), assurait la bonne exécution des tours de garde et des rondes. Un état dressé par le greffier de la ville le 15 juin 1632 donne le détail de la taxe à payer par chaque habitant de la ville pour ces frais de garde.

Cet état dénombre une bonne douzaine de familles EHRET-ERHART dont celle de Jean, le savetier. La guerre avait sans doute attiré à l'abri des fortifications de la ville de nombreux habitants des villages de la vallée, ce qui explique cette densité des EHRET alors que la plupart habitaient à cette époque la haute vallée.

En 1659, le dénombrement des familles Erhard de la vallée de Masevaux en situe trois dans la ville, une à Niederbruck, quatre à Kirchberg, une à Wegscheid et cinq à Rimbach. Le riche notariat ancien de la seigneurie, en partie publié dans le bulletin Bergha, renferme de très nombreuses mentions de cette famille pour le XVIIè siècle. Contrats de mariage, ventes, achats, certificats d'apprentissage font mieux apprécier la vie quotidienne de nos aïeux.

En 1659, Georges ERHARD dit le vieux, maire de la haute vallée de Masevaux (dont le siège était Sewen), épousait par contrat la veuve de Jacques BAUR de Michelbach. Quelques années plus tard, sa fille Anne-Marie se maria avec Adam STEGER, fils de Michel STEGER, maire de la haute vallée (contrat de mariage d'août 1668).

En 1662, un Georges ERHARD, de Langenfeld, acheta un petit moulin à Niederbruck. Ce bâtiment était constitué du moulin avec la maison d'habitation, la grange, le pressoir à huile, un jardin et quelques champs et prés, le tout d'un seul tenant.

Quatre années plus tard Georges ERHART et Adam STEGER louaient à un ressortissant Suisse (Jean DIETRICH de Fribourg) leur moulin à farine de Kirchberg pour une durée de six années.

Le bail n'arriva probablement pas à son terme puisqu'en 1670 les mêmes propriétaires relouèrent le dit moulin au meunier Gaspard HUG. Le bail fut concédé pour un an, de la Saint-Martin 1670 à la Saint-Martin 1671.

Georges ERHARDT, qui semble avoir eu beaucoup de biens, acheta en 1671 l'étang du Gresson à son beau-frère Pierre VERNIER de Belfort (voir au sujet de cet étang l'étude de Jean-Marie EHRET parue en 1992 dans l'annuaire "Patrimoine Doller" numéro 2).

Quelques années auparavant déjà, Constantin ERHART était propriétaire d'un étang à Wegscheid. En 1660, l'étang est mentionné comme étant complètement envahi par la végétation suite à la guerre.

Enfin, en 1690, Georges ERHART loua pour une période de trois ans son moulin à farine et son pressoir à huile de Langenfeld à Antoine LIECHTER, meunier de Langenfeld.

Curés de Tagsdorf et Traubach

Le remarquable travail de Louis KAMMERER sur le clergé d'Alsace d'Ancien Régime évoque trois ERHART de Masevaux qui se vouèrent à la prêtrise. Le premier, Jean Georges, né en 1716 à Masevaux, fut curé de Tagsdorf. Le second, Jean-Jacques-Valentin, fils du sergent seigneurial de la ville, fut ordonné prêtre en 1767.

Le dernier, François-Xavier, né en 1751 à Masevaux, fils du marchand André ERHARD et de son épouse Anne-Marie ARNOLD, eut une vie bien remplie. Ordonné en 1779, il fut vicaire puis curé de Sentheim. Emigré en Suisse sous la Terreur pour ne pas avoir à prêter le serment révolutionnaire, il rentra en 1802 et fut curé de Guewenheim puis de Traubach. Après un bref passage à Saint Amarin (1816), il revint à Traubach où il décéda en 1828.

Autre élément permettant de mieux appréhender la conviction religieuse de cette famille, le registre des miracles de Mariastein mentionne la grâce obtenue en 1675 par Marie ERHARD. Originaire de Masevaux, elle souffrait de terribles maux de tête dont elle ne fut délivrée que par l'intercession de Notre Dame de Mariastein.

Famille d'artisans, les ERHART de Masevaux possédaient plusieurs immeubles dans la ville. Ils participaient à la vie commerciale et administrative de la cité. En 1663, Jean-Jacques ERHART, bourgeois du lieu et maître sellier, donna un certificat de fin d'apprentissage à Melchior HENNEMANN de Delle. Pendant trois années, ce dernier avait appris le métier de sellier chez son maître comme le voulait la coutume.

A travers le monde

Après s'être développé dans un secteur géographique bien délimité, les EHRET-ERHARD ont essaimé en Alsace, en Europe et à travers le monde.

Dès 1692, un partage apprend que Marie-Ester ERHART de Masevaux était l'épouse de Jean ANDRES de Zillisheim. L'année suivante, nous trouvons le contrat de mariage passé par Catherine, la fille de Jacques ERHARD de Masevaux, avec Jean STEBLER venu de la région de Soleure et se trouvant chez son frère à Heywiller (notariat d'Altkirch).

Tout au long des XVIIè et XVIIIè siècles, des EHRET de la vallée de Masevaux se sont installés dans la vallée voisine de Saint-Amarin où ils ont fait souche, en particulier à Willer-sur-Thur et Mollau. Pas moins de trois EHRET originaires de Rimbach firent partie des armées napoléonniennes avant 1810. Dès 1817, les EHRET participèrent à l'aventure américaine.

Cette année-là, Sébastien EHRET de Rimbach fit sa demande de passeport, de même que Michel EHRET de Mollau (ce dernier avec toute sa famille). Entre 1845 et 1857, quatorze familles EHRET sollicitèrent des autorisations de départ vers l'Amérique. Venant d'Oberbruck, Wegscheid, Masevaux, Rammersmatt et Moosch, elles partirent à New York (point de départ vers d'autres destinations) ou la Nouvelle-Orléans.

Cette grande famille mériterait bien, à l'instar d'autres, un travail de fond et la publication d'un bulletin familial.

André GANTER